Si vous venez à mon atelier vous verrez des dizaines, voire des centaines de toiles, qui reflètent chacune mes préoccupations et réflexions, comme des sortes de cartographies intérieures. J’y suis essentiellement durant les belles saisons, quand la température n’est pas trop froide – lorsqu’il n y a plus de gel – l’endroit est inchauffable et vétuste. L’hiver, je dessine à la maison, au chaud – se faisant – je prépare les toiles à venir. J’ai pris ce rythme d’un calendrier intime depuis de nombreuses années. C’est peut-être aussi pour cela que ma peinture gorgée de couleurs a cette forme d’intensité caractéristique. Lorsque le froid s’efface, je ressens, à ce moment-là, l’énergie pour peindre. Je monte alors mes châssis et tends les toiles, en sortant progressivement de la période hivernal, ce qui me permet ensuite de libérer mon geste au travers mes différents thèmes. La musique y est souvent présente. Elle m’inspire énormément et me donne l’énergie dont j’ai besoin pour créer. Elle habille le lieu. Je ressens et vis la musique comme une puissante énergie. Peintures et musiques m’ont accompagné depuis le début de ma vie d’artiste, elles sont devenues indissociables à mon inspiration.
Il m’arrive certains jours de ne rien faire, d’être simplement là, assis dans le silence à regarder les traces de la veille ou les angoisses du jour, dans une méditation bénéfique et nécessaire. Il me faut beaucoup de travail pour parvenir à cet expressionnisme. C’est un travail très physique. J’essaie de tout mettre en place pour qu’il puisse n’y avoir finalement plus que le geste, cela est une véritable organisation; une recherche d’incarnation dans la matière de mes visions intérieures.
La création est pour moi une quête pour tenter de mieux comprendre ce qui me fabrique et me construit au travers ma propre conscience, comme un miroir qui reflète une image à décrypter. C’est également un chemin, une sorte de topographie personnelle qui me permet de me situer, de m’orienter; grâce à mon imaginaire et à mes fulgurances picturales; émerge alors un monde étrange qui m’étonne et qui surprend bien souvent également le visiteur. Il y a des thèmes
qui reviennent cycliquement, ils représentent chacun des symboles que je ne peux représenter que par la peinture, par l’image Voir ici C’est la grande force de cette expression, elle exprime une forme d’essentiel, une immédiateté à approfondir, avec aujourd’hui cette formidable chance de la mettre en musique avec mes propres sons. Comme si finalement matière et énergie fusionnaient enfin.
David Ciana